La Turquie a convoqué, mardi 19 octobre, les ambassadeurs de dix pays dont la France, l’Allemagne et les Etats-Unis, jugeant « inacceptable » l’appel en faveur de la libération de l’opposant Osman Kavala lancé par ces Etats, a fait savoir le ministère des affaires étrangères turc. « Le communiqué [publié lundi par les dix pays] sur les réseaux sociaux au sujet d’une procédure judiciaire menée par une justice indépendante est inacceptable », a affirmé le ministère.
« Nous leur avons dit qu’ils violaient l’Etat de droit, la démocratie et l’indépendance de la justice qu’ils défendent », a poursuivi le ministère, selon le communiqué publié à l’issue de la convocation des ambassadeurs. « Il a été souligné que la Turquie est un Etat de droit démocratique qui respecte les droits de l’homme, et il leur a été rappelé que la justice turque ne serait pas influencée par de telles déclarations. »
Dans un communiqué publié lundi soir, le Canada, la France, la Finlande, le Danemark, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, la Suède et les Etats-Unis avaient appelé à un « règlement juste et rapide de l’affaire » Osman Kavala, éditeur et mécène turc devenu une bête noire du régime, emprisonné depuis quatre ans sans condamnation. « Le retard persistant [pris par] son procès (…) jette une ombre sur le respect de la démocratie, de l’Etat de droit et de la transparence du système judiciaire turc », écrivaient les représentants des dix pays.
Gardé en prison malgré les menaces de sanctions européennes
L’homme d’affaires et philanthrope Osman Kavala, emprisonné depuis octobre 2017, restera au moins jusqu’au 26 novembre en prison, a décidé début octobre un tribunal d’Istanbul, malgré les menaces européennes de sanctions contre Ankara. Cet opposant de 64 ans, figure majeure de la société civile, est accusé depuis 2013 par le régime du président Recep Tayyip Erdogan de chercher à déstabiliser la Turquie.
Il est notamment en ligne de mire pour avoir soutenu, en 2013, les manifestations antigouvernementales connues sous le nom de mouvement de Gezi ayant visé M. Erdogan, alors premier ministre. Puis il a été accusé d’avoir cherché à « renverser le gouvernement » lors de la tentative de coup d’Etat de 2016.
En décembre 2019, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) avait ordonné sa « libération immédiate », en vain. Le Conseil de l’Europe a récemment menacé Ankara de sanctions, qui pourront être adoptées lors de sa prochaine session (du 30 novembre au 2 décembre) si l’opposant n’est pas libéré d’ici là.
Osman Kavala a estimé la semaine dernière que sa détention permettait au pouvoir de M. Erdogan de justifier ses « thèses complotistes ». « Pour moi, la vraie raison de ma détention prolongée répond au besoin du gouvernement d’entretenir la fiction d’un complot », a-t-il déclaré depuis sa cellule par le biais de son avocat.