Dix jours après le séisme qui a dévasté la Turquie et la Syrie, les Nations unies (ONU) ont lancé, jeudi 16 février, un appel à l’aide internationale pour la Turquie, alors que le bilan global continue de s’alourdir et dépasse à présent les 41 000 morts dans les deux pays.
- Deux survivantes sorties des décombres
Selon des sources officielles et médicales, 41 732 personnes − 38 044 en Turquie et 3 688 en Syrie − ont désormais perdu la vie après le séisme de magnitude 7,8 qui a ravagé la zone frontalière entre les deux pays le 6 février.
Alors que les chances de retrouver des survivants s’amenuisent, les sauveteurs turcs ont sorti jeudi des décombres une jeune fille de 17 ans et une femme d’une vingtaine d’années.
Dans de nombreuses villes et villages des deux pays, les secours s’acharnent toujours à tenter de venir en aide à d’éventuels survivants mais chaque heure qui passe diminue les chances qu’ils aient pu résister, dans un froid glacial, sous les débris. La Turquie a suspendu par conséquent les opérations de sauvetage dans certaines régions et le gouvernement de Syrie, pays déchiré par la guerre depuis douze ans, a fait de même dans les zones qu’il contrôle.
- L’appel aux dons de l’ONU pour la Turquie
Face à la catastrophe naturelle la plus meurtrière de l’histoire post-ottomane de la Turquie, l’ONU exhorte la communauté internationale à apporter son aide financière au pays afin de récolter un milliard de dollars (près de 950 millions d’euros).
« Le financement, qui couvre une période de trois mois, portera assistance à 5,2 millions de personnes et permettra aux organisations d’aide de renforcer leur soutien crucial aux efforts conduits par le gouvernement » de la Turquie, « frappée par le tremblement de terre le plus dévastateur dans le pays en un siècle », a écrit le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, dans un communiqué.
Il a « exhorté la communauté internationale à agir davantage et à financer dans sa totalité cet effort vital pour répondre à l’une des plus grandes catastrophes naturelles de notre temps ».
« La Turquie abrite le plus grand nombre de réfugiés au monde et a fait montre d’une immense générosité à l’égard de son voisin syrien depuis des années », a insisté le chef de l’ONU.
« Il est temps dorénavant que le monde soutienne la population de Turquie, comme elle l’a fait tout simplement avec d’autres en quête d’aide », a ajouté M. Guterres, précisant que « les besoins étaient énormes, [que] les gens souffraient et [qu’] il n’y avait pas de temps à perdre ».
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Interrogé sur le nombre de personnes visées par l’appel aux dons − 5,2 millions, soit près du double affectées par le séisme − le porte-parole du secrétaire général, Stéphane Dujarric, a précisé que la décision avait été prise en concertation avec le gouvernement turc. Pour « se concentrer sur les personnes ayant le plus besoin d’aide le plus rapidement, et là où l’ONU peut être le plus efficace », a-t-il expliqué.
Mercredi, Antonio Guterres avait exhorté tous les Etats membres à fournir « sans délai » près de 400 millions de dollars pour garantir « une aide humanitaire dont près de cinq millions de Syriens ont désespérément besoin », à commencer par « des abris, des soins médicaux, de la nourriture » pour trois mois.
« Les besoins sont immenses » et « nous savons tous que l’aide qui sauve des vies n’entre pas à la vitesse et à l’échelle nécessaires », a insisté le secrétaire général. « Une semaine après les séismes dévastateurs, des millions de personnes à travers la région luttent pour survivre, sans abri et confrontés à des températures glaciales », avait-il ajouté.
La différence de montant entre les deux pays s’explique notamment par le fait qu’il existait déjà avant le séisme un appel de l’ONU à financer le plan de réponse humanitaire pour la Syrie, chiffré à 4,8 milliards de dollars pour 2023, a expliqué Stéphane Dujarric. Ce qui n’est pas le cas pour la Turquie.
D’autre part, ArcelorMittal, deuxième groupe sidérurgique mondial, décrivant une situation « déchirante », a annoncé un don de 5 millions de dollars pour venir en aide aux victimes des séismes en Turquie et en Syrie, via les organisations humanitaires Médecins sans frontières et Disasters emergency committee.
- La Syrie renoue des liens avec les pays arabes
Le président syrien Bachar al-Assad a remercié jeudi ses « frères arabes » pour l’aide fournie après le séisme meurtrier qui a poussé plusieurs pays de la région à rompre des années de silence diplomatique avec Damas. M. Assad a ainsi reçu des appels de dirigeants de plusieurs pays arabes dont certains avaient rompu leurs liens avec le régime syrien il y a plus de dix ans en raison de la répression du soulèvement populaire de 2011 qui a dégénéré en guerre civile.
Quelque 120 avions chargés d’aide ont également atterri dans les aéroports du pays, dont environ la moitié en provenance des Emirats arabes unis, premier pays du Golfe à avoir rétabli ses relations avec Damas en rouvrant son ambassade en 2018.
« Nous ne pouvons omettre d’exprimer nos remerciements à tous les pays qui se sont tenus à nos côtés depuis les premières heures de la catastrophe parmi nos frères arabes et nos amis », a déclaré le président syrien lors d’un discours télévisé jeudi. « Leur aide a eu un impact majeur sur le renforcement de notre capacité à faire face aux conditions difficiles durant ces heures critiques », a poursuivi le président dont le pays souffre depuis près de douze ans d’une guerre civile qui a fait près d’un demi-million de morts, ravagé les infrastructures et déplacé des millions de personnes.
« L’ampleur de la catastrophe et les tâches qui nous incombent dépassent largement les moyens disponibles », a déclaré M. Assad, ajoutant que le pays resterait confronté à d’énormes défis sociaux et économiques,
Bachar al-Assad s’est retrouvé isolé diplomatiquement après le début de la guerre civile, notamment parmi les pays arabes, et fin 2011, la Syrie a été exclue de la Ligue arabe.
Les efforts d’aide à ce pays ont été menés par Abou Dhabi, qui a participé à rompre son isolement. Plusieurs autres pays arabes ont esquissé une ouverture en direction de Damas après le séisme. L’Arabie saoudite a envoyé deux avions transportant de l’aide en Syrie depuis mardi, après une suspension des vols pendant plus de dix ans.
Bachar al-Assad a également rencontré les ministres des affaires étrangères des Emirats et de la Jordanie à Damas, et a reçu des appels des dirigeants de l’Egypte, du Bahreïn et de la Jordanie.